Les 35 nouveaux événements détectés par Virgo et LIGO lors de leur dernière prise de données et dont les résultats viennent d’être rendus publics (O3b : novembre 2019 >> mars 2020) portent à 90 le nombre de signaux d’ondes gravitationnelles observés à ce jour. La publication de ce nouveau catalogue (GWTC-3) s'accompagne de la mise à disposition du public de toutes les données issues des détecteurs, et de la publication de 4 articles dont un sur la vitesse d'expansion de l'Univers, coordonné par un chercheur d'Artemis.
La plupart de ces nouveaux signaux ont été produits lors de fusions de deux trous noirs : chacun de ces cataclysmes cosmiques fait vibrer l’espace-temps et génère une bouffée puissante d’ondes gravitationnelles. Deux événements, dont l’un avait déjà été publié au mois de juin dernier, ont été identifiés comme des fusions entre une étoile à neutrons et un trou noir, une source d’ondes gravitationnelles d’un type nouveau, observée pour la première fois lors de la prise de données LIGO-Virgo O3. Un autre signal de fusion, détecté en février 2020, pourrait provenir soit d’un système de deux trous noirs, soit d’une paire mixte étoile à neutrons et trou noir.
Ces résultats, publiés aujourd’hui dans notre troisième catalogue de sources transitoires d’ondes gravitationnelles, GWTC-3, brossent le portrait de nouvelles populations de trous noirs dont les masses, associées à celles des étoiles à neutrons observées, apportent des informations nouvelles et importantes sur la manière dont les étoiles vivent et meurent, ce qui élargit encore le champ de l’astronomie gravitationnelle.
En même temps que ce catalogue, deux articles sont publiés qui traitent des conséquences pour la cosmologie et l’astrophysique de ces nouvelles observations d’ondes gravitationnelles. Simone Mastrogiovanni, qui vient de rejoindre l’Observatoire de la Côte d’Azur (ANR COSMERGE/laboratoire Lagrange/Artemis) est responsable de la publication concernant la vitesse d'expansion de l'Univers. Un quatrième article résume l’ensemble des tests de la relativité générale que tous ces événements permettent. Enfin, un cinquième article est consacré à la recherche d’ondes gravitationnelles émises en liaison avec un sursaut gamma.
En parallèle, les collaborations Virgo, LIGO et KAGRA ont rendu publiques aujourd’hui toutes leurs données calibrées, enregistrées par les détecteurs LIGO et Virgo entre novembre 2019 et mars 2020. C’est donc l’ensemble des données de LIGO et Virgo prises lors de toute la campagne O3 (Mars 2019 - Mars 2020) est disponible sur le site GWOSC. Cela permet à d’autres chercheurs ou amateurs qui le voudraient, de vérifier les résultats publiés par des analyses indépendantes, ou d’exploiter de façons différentes et avec leurs propres idées, ces données scientifiques uniques.
Les progrès obtenus en quelques années dans le domaine des ondes gravitationnelles sont inouïs, des premières détections à l’observation de plusieurs signaux par mois. Ils ont été rendus possibles par les programmes réguliers d’améliorations techniques qui ont transformé les premiers instruments pionniers en des détecteurs efficaces à la sensibilité régulièrement améliorée. Cette progression est évidente si l’on remarque que, sur les 90 détections publiées à ce jour, 79 viennent de la prise de données LIGO-Virgo la plus récente, O3, entre avril 2019 et mars 2020.
Une nouvelle phase d’améliorations est en cours pour les détecteurs Virgo et LIGO. La prochaine prise de données commune (O4) est prévue pour le second semestre 2022 et devrait se caractériser par une sensibilité encore accrue, laquelle permettra d’observer un volume d’Univers près de 10 fois plus grand que précédemment et donc de détecter encore plus de signaux d’ondes gravitationnelles.
« L’un des changements principaux au niveau du détecteur Virgo consiste en l’ajout d’une cavité optique supplémentaire (appelée cavité de recyclage du signal) qui permet d’améliorer la sensibilité du détecteur à hautes fréquences », explique Sebastian Steinlechner, maître de conférence à l’Université de Maastricht et membre du laboratoire Nikhef. “Cela se traduira par une capacité accrue de l’instrument pour ‘écouter’ les derniers instants avant la fusion d’un système binaire de trous noirs ou d’étoiles à neutrons.”
Le groupe Virgo d’Artemis a aussi développé, en collaboration avec Azur Light System, un nouveau laser, plus puissant, utilisant une technologie qui devrait permettre la montée en puissance nécessaire aux performances attendues dans le futur. Après une longue phase de tests à Nice, il a été installé en 2020 et est entré en fonction avec succès. « Virgo est maintenant équipé d’un laser fibré dont la puissance peut atteindre 130 W. Cette puissance sera nécessaire pour atteindre la sensibilité nominale en 2025 », souligne Walid Chaibi, chargé de recherche CNRS et responsable de l’activité laser du laboratoire Artemis de l’Observatoire de la Côte d’Azur.
Pendant ce temps, le réglage et l’entrée en fonction d’un nouveau détecteur, KAGRA, au Japon, sont en cours ; KAGRA devrait rejoindre LIGO et Virgo au cours de la prise de données O4. Augmenter la taille du réseau de détecteurs d’ondes gravitationnelles permettra de rendre plus précise la localisation des sources des signaux dans le ciel, une étape capitale pour les développements futurs de l’astronomie multi-messagers avec ondes gravitationnelles.
Contacts
Nelson Christensen, nelson.christensen@oca.eu
Gilles Bogaert, gilles.bogaert@oca.eu
Marie-Anne Bizouard marieanne.bizouard@oca.eu
Walid Chaibi oualid.chaibi@oca.eu